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C’est officiel : les OGM sont sans dangers… mais les gens refusent d’y croire – Tamar Haspel

Les variétés génétiquement modifiées (GM) sont aussi sûres que leurs équivalents non-GM, elles n’ont pas d’impact environnementaux négatifs et ont réduit les besoins en pesticides.. Tout ceci selon un rapport exhaustif rendu aujourd’hui par l’Académie National des Sciences – un groupe fondé par le congrès américain afin de fournir des réponses basées sur la science sur une large gamme de problématiques.

Cet article est une traduction de  : Scientists Say GMO Foods Are Safe, Public Skepticism Remains

Mais l’académie a également découvert que ces mêmes variétés n’avaient pas fait augmenter le rendement potentiel des cultures et avaient conduit à des problèmes liés à des plantes résistantes aux herbicides, ces derniers étant aussi coûteux que répandus.

Le rapport fait état de ce que, en plus de la sécurité, d’autres problèmes doivent être pris en compte, y compris le fait de gagner la confiance du public. Il recommande un débat plus transparent et comportant de plus nombreux acteurs sur le futur de ces cultures.

Le dossier, compilant deux ans de travaux, est composé de 338 pages claires, s’i,téressant à tous les aspects des cultures GM. « Les affirmations générales concernant les variétés GM sont problématiques car les problématiques qui y sont reliées sont multidimensionnelles » indique le rapport dès ses premières pages, avant de s’y intéresser en profondeur.

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170.3 millions d’hectares ont été semés avec des PGM.

Les conclusions sont généralement positives mais comprennent de nombreuses mises en garde et appel à la prudence. Pour ceux qui voudraient la version courte, en voici une version très résumée :

  • Les variétés GM ne posent pas de problème liés à leur consommation. Il y a bien sûr toujours une incertitude, mais aucune preuve d’effets adverses n’a pu être identifiée.

  • Les variétés GM de notre système agro-alimentaire n’ont pas permis d’augmenter le rendement potentiel. Elles ont cependant permis aux agriculteurs de mieux protéger leurs champs contre insectes et mauvaises herbes.

  • Les variétés résistantes à des herbicides et celles comprenant le pesticide « bio » Bt ont toutes deux permis de réduire l’utilisation de pesticides, même si ces réductions ont eu lieu tôt et que certaines n’ont pas été durables.

  • L’augmentation de l’utilisation du glyphosate, herbicide que certaines variétés GM tolèrent, a été responsable du vaste et coûteux problème des mauvaises herbes résistantes elles aussi au produit.

  • Le rapport n’a pas pu identifier d’impact sur la biodiversité ni de danger lié aux croisements entre variétés GM et sauvages.

  • Même si utilisation de variétés GM et emploi de techniques agricoles réduisant le labour ont toutes deux augmentés, le rapport n’a pas pu établir de lien de cause à effet.

  • Les bénéfices économiques pour les fermiers ont été bien documentés, même si cela peut varier d’une situation individuelle à une autre.

  • Les petits exploitants peuvent avoir des difficultés à accéder à ses gains économiques du fait du prix des semences et des difficultés d’accès au crédit.

  • Une régulation appropriée est impérative, et cette régulation devrait se faire sur les caractéristiques des variétés et non sur la technique permettant de les obtenir, que cette dernière soit liée au génie génétique ou pas.

  • Les débats publics liés aux variétés GM et aux problèmes qui y sont associés devraient se caractériser par plus de transparence et de participation de la société civile.

Le rapport note également que génie génétique et sélections conventionnelle sont tous deux aussi importants pour l’amélioration des variétés. Chaque méthode a ses forces et ses faiblesses, et les considérer « comme des approches en compétition est une fausse dichotomie ; plus de progrès dans l’amélioration des variétés peuvent être obtenus en utilisant les deux… qu’en en utilisant qu’une seule » (voir Ce chercheur peut-il réconcilier le génie géntéique et les cultivateurs bio?).

Pour ceux d’entre vous qui seraient intéressés par une revue plus détaillée, voici une revue plus complète des conclusions du comité.

Santé humaine

Le comité n’a pas pu mettre en évidence de preuve que la consommation de fruits et légumes issus de plantes génétiquement modifiés augmente le risque d’allergie, ait un effet significatif sur l’appareil digestif ou pose un risque de transfert horizontal de gènes.

Il n’a pas non plus trouvé de pics de problèmes de santé comme l’autisme, le cancer ou des déficiences rénales qui soient corrélés avec l’introduction des aliments GM dans le régime alimentaire.

Le comité admet l’existence de petite différences du microbiome lors de certaines expériences sur des animaux mais conclut que ces aliments « ne semblent pas causer de problèmes de santé ».

Sur l’allergénicité, le comité reconnaît « qu’il existe des limites à ce que nous pouvons savoir sur les effets sur la santé de tous les types d’aliments, qu’ils soient produits de manière conventionnelle ou en utilisant également le génie génétique ».

Au final, le rapport conclut [qu’] « aucune différence impliquant une augmentation des risques pour la santé humaine et la sécurité n’a pu être trouvé entre les aliments GM et leurs équivalents conventionnels. » Mais le comité prend aussi le temps de rappeler qu’il existe des limites à ce que nous pouvons savoir.

Tout nouvel aliment, qu’il soit GM ou non, « peut impliquer des effets subtils aussi bien favorables que défavorables pour la santé que nous ne pouvons détecter même avec les moyens les plus puissants et que ces effets peuvent se développer sur la durée. »

Les conclusions du rapport incluent également des notes d’optimismes sur le fait que cultures GM et non-GM comprenant des concentrations supérieures en nutriments pourraient avoir « des effets bénéfiques pour la santé de millions de personnes. »

Rendement des cultures

Le rapport fait la distinction entre rendement potentiel (la récolte maximale obtenue avec des conditions idéales) et rendements réels (après que les insectes, les maladies, le mauvais temps ou les mauvaises herbes aient pris leur part). Il n’y a pas de preuves que les cultures GM aient augmentés les rendements potentiels, qui augmentaient déjà nettement avant que ces dernières soient introduites et ont continué à augmenter après.

Ces variétés peuvent, néanmoins, aider à protéger les champs des pestes.

Utilisation des pesticides

Les variétés intégrant le pesticide « bio » Bt n’ont pas seulement réduit les pulvérisations d’insecticides dans les champs dans lesquelles elles sont semées : elles ont, dans certains cas (comme avec la pyrale européenne du maïs), réduit les populations de nuisibles que les épandages ont aussi été moins nécessaire dans les parcelles non-GM.

Le rapport note, cependant, que les insectes peuvent développer une résistance au Bt (certains l’ont déjà fait). Pour contrer cela, une gestion appropriée (incluant des refuges, qui sont des zones où des variétés non-BT sont semées pour que les insectes n’y développent pas de résistance) est essentielle et le rapport exprime ses inquiétudes concernant « le manque de respect des obligations de créations de zones refuges. »

Les variétés modifiées afin de leur permettre d’exprimer un insecticide sont une partie d’une stratégie de lutte contre les pestes mais ne sont pas, seules, la solution au problème des insectes.

Pour les variétés tolérantes au glyphosate, l’herbicide présent dans le Round-Up, les choses sont plus compliquées. Tandis que ces variétés ont fait initialement baisser l’utilisation globale d’herbicide, le rapport montre que ces baisses n’ont pas été durables. Le comité rejette également vigoureusement la pertinence de la mesure de l’application d’herbicides (en kg/ac ou kg/ha), puisque certains herbicides sont plus toxiques que d’autres et suggère que les chercheurs « ne devraient pas être encouragés » à publier ces chiffres.

Le revers des cultures tolérantes aux herbicides est que « dans de nombreux endroits, des mauvaises herbes ont développé une résistance aux glyphosate. » Le rapport cite une étude qui a estimé le coût de la gestion de ces plantes à $66/acre pour le maïs et $22/acre pour le soja, un montant qui peut parfois faire la différence entre marge brute positive et négative.

Une meilleure gestion des mauvaises herbes doit aller main dans la main avec le déploiement de variétés résistante à un herbicide conclut le rapport.

Biodiversité et impact environnemental

Le rapport s’intéresse à une large gamme de problèmes relatifs à la façon dont les OGM interagissent avec l’environnement. Voici ses conclusions :

  • Il n’y a pas de preuves d’effets dommageable pour les abeilles.

  • Même si rotation des culture et diversité des variétés ont décliné depuis 1987, le rapport n’a pas pu identifier de lien de cause à effet avec les variétés GM. Le comité note en revanche que certaines variétés peuvent faciliter « une gestion performante de larges surfaces de ces variétés sans rotation. » D’un autre côté, le comité a montré des preuves que des variétés GM pourraient rendre possible des rotations des cultures qui seraient « bien trop chères ou difficiles » sans le contrôle des mauvaises herbes rendus possible par les variétés tolérantes au glyphosate.

  • Les recherches n’ont pas pu montrer que « l’élimination de l’asclépiade par le glyphosate soit la cause du déclin du papillon monarque » mais les chercheurs ne sont pas d’accord sur le fait de savoir si oui ou non l’herbicide a un impact sur le papillon.

  • Même si il y a eu des transferts de gènes de variétés GM vers des variétés sauvages, « aucun exemple d’effet environnemental délétère n’a pu être apporté. »

  • Le rapport n’a pas pu trouver de relation de cause à effet claire entre utilisation de variétés tolérantes à un herbicide et les pratiques agricoles ’’sans labour ’’.

Effets économiques et sociaux :

 

Le rapport prend en compte le fait que, lorsqu’il est question d’introduire une nouvelle variété dans un système agro-alimentaire, il faut voir au-delà des effets sur la santé humaine et l’environnement et prendre en compte les variables sociales et économiques.

  • Globalement, les variétés GM ont eu un impact favorable pour les agriculteurs les ayant adoptées, mais il y a de nombreuses variations de revenus. Les variétés résistantes aux insectes réduisent les pertes qui y sont liées et celles tolérantes à un herbicide « tendent à réduire les temps de manipulation. »

  • Les bénéfices des variétés GM ne sont pas toujours accessibles pour les petits exploitants en raison du prix des semenaces et d’un accès inadéquat aux possibilités de crédit, « en plus d’autres problèmes structurels. »

  • Pour que ces petits fermiers aient accès aux gains économiques, ils auront souvent besoin « d’un soutien institutionnel, comme l’accès au crédit, des intrans abordables, des extensions de service et un marché. » Ils peuvent avoir besoin d’aide pour « améliorer la fertilité du sol, augmenter la disponibilité des nutriments et optimiser la densité des semis. ».

  • Les difficultés liées à la régulation ont augmenté le coût de développement des variétés GM, ce qui rend le développement de variétés qui ne sont pas massivement semées plus difficile pour le secteur privé. Ceci est contre-productif si l’on désire obtenir une large gamme de variétés.

  • Le rapport note que certaines études ont suggéré que les variétés GM « contribuent à la déqualification des agriculteurs. »

  • Il est important de prévenir la présence de variété GM dans les champs non-GM, à la fois pour des raisons sociales et économiques. « Les agriculteurs veulent avoir la liberté de choisir quelle variété cultiver », et les variétés non-GM peuvent être vendues à un prix plus élevés. Le comité note que cela arrive souvent : « de nombreuses zones marient avec succès plantations bio, conventionnelles et GM. »

  • Un problème économique d’importance est la rupture d’égalité des marchés. Comme différents pays approuvent l’utilisation de différentes variétés à différentes périodes, le commerce devient complexe. « La déstabilisation des marchés […] va probablement continuer et est susceptible d’engendrer des coûts pour les pays importateurs et exportateurs. »

  • Le rapport aborde aussi le problème fondamental de la confiance. Il est « difficile de cerner le coût d’une perte de confiance du public dans un produit, une industrie ou dans la légitimité d’un système de régulation. »

Régulation

 

Le rapport indique que la régulation des variétés GM « devrait faciliter l’obtention de bénéfices sociétaux maximum […] à un niveau donné de risque acceptable. » Le comité reconnaît que c’est un défi de taille puisqu’à la fois risques et bénéfices varient selon les cultures.

L’Académie Nationale des Sciences est claire : c’est le produit et non le processus qui devrait faire l’objet de régulations.

D’autres problèmes incluent :

  • Les brevets (que ce soit pour les variétés GM ou pas) peuvent limiter l’accès aux « petits fermiers, négociants et sélectionneurs qui manquent des ressources pour payer les redevances ou faire face aux requis juridiques légaux » et il y a un désaccord sur le fait que les brevets facilitent ou entravent « le partage des connaissances, l’innovation, et la commercialisation de biens utiles. » Le rapport prédit qu’une technologie « qui soit plus utile aux petits fermiers ou au fermiers de niche devra probablement émerger des recherches issues du secteur public ou de partenariats public-privé » puisque les industries n’ont pas d’intérêt immédiat à travailler sur ces types de variétés.

  • Même si le problème de la labellisation est complexe et qu’il y a « de forts arguments non relatifs à la sécurité alimentaire et un fort soutien public à la labellisation [le comité] ne croit pas que cette dernière soit justifiée dans une optique de protection de la santé publique. »

  • « Les politiques relatives aux OGM ont des dimensions scientifiques, légales et sociales, et on ne peut pas compter sur la science pour apporter une réponse à toutes. » Les valeurs et priorités de toutes les parties prenantes doivent être considérées

  • Les instances de régulations doivent être des communicant pro-actifs et « la transparence et la participation de la société civile [sont] d’une importance critique pour une gouvernance crédible, audible et appropriée. »

  • « Le manque d’accès public aux données relatives à la santé et à la sécurité soumis par les entreprises génère une baisse de confiance de la part de certains acteurs [puisque] le public ne peut pas juger de lui-même de la qualité, de l’objectivité et de la compréhensibilité des travaux fournis. » Tandis que le comité reconnaît « la légitimité de la nature confidentielle des informations liées aux affaires », il enjoint les différents acteurs à partager ces dernières autant que faire se peut.

 

Regarder vers l’avenir :

 

Le rapport entrevoit un rôle important pour l’ingénierie génétique et « le comité espère que sa potentielle utilité dans l’amélioration des variétés dans les décennies à venir sera concrétisée. » Capacités nutritives améliorés, meilleures utilisations des nutriments, baisse des émission de gaz à effet de serre et résistance aux pathogènes ne sont que quelques-unes des façons dont les variétés GM peuvent améliorer la santé de notre espèce et de son environnement, la condition des agriculteurs et sa durabilité rappelle-t-il.

6 commentaires sur “C’est officiel : les OGM sont sans dangers… mais les gens refusent d’y croire – Tamar Haspel

  1. Thiloup
    19 Mai 2016

    A reblogué ceci sur Ecologie Raisonnée.

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    • Maeelk
      31 janvier 2017

      Euh, c’est gentil mais qu’est ce que je suis sensé aller voir dans ce lien ? =D

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